Rien n'est jamais inscrit dans le marbre
"Ne jamais oublier qu'il suffit d'une crise politique, économique ou religieuse pour que les droits, tous les droits, notamment ceux des LGBTQIA+ soient remis en question. Ces droits ne sont jamais définitivement acquis. Notre vie durant, nous devons demeurer vigilants."
Les larmes de l'arc-en-ciel
Des décennies de combat, pour en arriver là !
Drapeau palestinien, homme lynché... L’affiche de la "marche des fiertés" de Paris suscite l’indignation.
Ça "l'affiche" mal
Le visuel dévoilé par l’Inter-LGBT, le collectif d’associations en charge d’organiser la marche des fiertés qui se déroulera à Paris le 28 juin, a fait sortir de ses gonds la droite et l’extrême droite.
Alors que le mot d’ordre politique de la manifestation sera "contre l’internationale réactionnaire", la présidente de l’Île-de-France, Valérie Pécresse refuse d’y voir associé le logo de la région. Sur X, elle a dénoncé une affiche incitant "à la violence avec son cadavre renversé " et annoncé ne pas verser la subvention à l’Inter-LGBT pour l’année 2025.
Sur le même réseau social la Dilcrah (Délégation interministérielle à la lutte contre le racisme, l’antisémitisme et la haine anti-LGBT), sur demande de la ministre Aurore Bergé, a également demandé à ne pas être représentée sur l’affiche, même si son logo ne semble pas figurer en l’état sur le visuel diffusé –, estimant que "la lutte contre la haine LGBT+ ne saurait passer par l’incitation à la violence ou à la haine".
L’association FLAG !, créée par des policiers et fonctionnaires de justice LGBT et associée à l’organisation de la marche, qui se désolidarise totalement de cette affiche, dont elle a demandé le "retrait immédiat". De son côté, la RATP a également informé avoir arrêté son partenariat avec l’InterLGBT "suite à la publication de l’affiche sans aucune autorisation et validation du contenu de notre part".
Dès mercredi, plusieurs personnalités politiques du Rassemblement national s'engouffrent dans la brèche et s'érigent en défenseurs des droits des LGBT en s'insurgeant contre cette illustration, publiée la veille en une du journal L’Humanité.
Jean-Philippe Tanguy, porte-parole du RN, a exprimé son opposition sur X : "Femme voilée, homme blanc martyrisé et caricaturé en facho, soutien à la Palestine, alors que les homos, bis et trans y sont massacrés… voilà les marqueurs d’extrémistes qui se moquent des violences bien réelles que subissent les homos en France comme tant d’autres Français."
Dans son camp, Julien Odoul, député de l’Yonne, ou encore Sébastien Chenu, élu du Nord, ont également manifesté leur vive désapprobation.
À l’inverse, ce jeudi matin, Jean-Luc Mélenchon a exprimé son soutien à l’association organisatrice. "Il s’agit du droit de maîtriser sa propre existence. Rien de plus, rien de moins", écrit-il sur X. "Les pressions et les menaces de l’extrême droite, prétendent faire renoncer des personnes à être elles-mêmes."
Il n’est pas question de critiquer l’organisation de la marche des fiertés. Mais je m’interroge: quel rapport entre les droits LGBT et cette affiche ? Je cherche, je cherche...
Nulle référence au drapeau arc-en-ciel ou à l’homophobie
Sept personnages contre "l’internationale réactionnaire"
Comme vous pouvez le voir, sur le visuel de la marche annuelle en défense des droits des personnes LGBT+ figurent sept personnages, dont un portant le voile et brandissant une pancarte "Contre l’internationale réactionnaire". Une autre personne arbore un triangle rose (le symbole cousu par les nazis sur les uniformes des détenus homosexuels dans les camps de concentration) et une autre plusieurs pin’s dont un avec le drapeau palestinien.
Au premier plan, un homme en noir et blanc, avec une croix celtique symbole de la "suprématie blanche" tatouée dans le cou, semble avoir été mis KO. Il est retenu par un autre personnage par sa cravate.
Dans son communiqué de presse, l’Inter-LGBT invoque la situation des minorités en Russie, Hongrie, ou Bulgarie où les prides sont interdites, mais aussi les polémiques réactionnaires en France autour des personnes trans ou des programmes d’éducation à la vie sexuelle et affective. "L’internationale réactionnaire s’organise contre les personnes LGBTQIA+ mais porte un programme politique rétrograde et mortifère pour tous-tes. En agitant la peur de l’autre et en œuvrant à la division de la société", étrille le texte.
Chapeau Mélo et bottes de Queers
L’association Fiertés Citoyennes !, qui se revendique "non partisane", s’est offusquée de "cet assemblage confus de symboles prétendument politiques, de slogans mal digérés et de ’convergence des luttes’ surjouée". Selon elle, "le message contradictoire qui en résulte, traversé par un biais idéologique manifeste, finit par flouter les revendications autour des personnes LGBT+ au point de les rendre absurdes".
Plusieurs figures de la défense des droits LGBT alertent sur la radicalisation de l’association Inter-LGBT. Un ancien porte-parole de l’organisation estime que "l’emprise de La France insoumise et de l’ultragauche" est désormais "flagrante".
"Nos camarades sont en train de mourir"
Contactée par l’AFP face aux réactions indignées de la droite et de certaines associations, l’InterLGBT a dénoncé des "contresens grossiers". Le sac n’a "rien à voir avec la Palestine, il représente le drapeau de la Hongrie et le drapeau de la Bulgarie où les prides sont interdites actuellement", a insisté son président Alexandre Schon. Quant au "lapin sur le buste de l’homme en vert, il s’agirait d’"une marque de ralliement des personnes queer en Asie de l’Est".
Une autre militante jointe par téléphone déplore "le tas de contresens" qui circulent autour de l’illustration. Elle affirme néanmoins que ce dessin a fait l’objet "d’un bouillonnement et de discussions" entre toutes les associations membres de l’Inter-LGBT.
Dans ce visuel, "l’artiste a voulu représenter des personnes queers unies face à une internationale réactionnaire qui tue des personnes LGBT, les empêche de s’exprimer, restreint leur droit à exister, à s’aimer et à s’autodéterminer", a-t-il ajouté. "On a des milliers de nos camarades qui sont en train de mourir aujourd’hui, il est vital que ce mot d’ordre ne soit ni détourné politiquement ni réapproprié sur la base de contresens".
L’inter-association a reçu le soutien des insoumis dont Jean-Luc Mélenchon et Mathilde Panot. "Oui, l’extrême droite est la principale menace qui pèse sur les personnes LGBTQI ! Soutien total à l’Inter-LGBT et à son courage face au déferlement réactionnaire", a cinglé la présidente du groupe insoumis à l’Assemblée.
Mais lorsque l'on est obligé de sous-titrer, d'expliquer, de se justifier à ce point une affiche, c'est peut-être que la communication est mauvaise et qu'elle est passée complètement à côté du message qu'elle voulait réellement porter.